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  [Voir les textes de référence dans le dossier documentaire]

1) De 1795 à 1815, le Luxembourg fait partie de la République française puis de l’Empire de Napoléon 1er. Il constitue l’essentiel du département des Forêts.

En 1815, il passe sous domination hollandaise, puis belge en 1830, puis prussienne en 1839… et devient un État souverain en 1867.

Depuis 1815, jusque tout récemment, le Grand-Duché continue d’appliquer des dispositions héritées de la période française, notamment :

  • la loi du 18 germinal an X (8 avril 1802), autrement dit les Articles organiques (qui, pour le culte catholique, constituent le copieux versant règlementaire du Concordat de 1801)
  • le décret du 30 décembre 1809 concernant les fabriques des églises.

2) La Constitution du Grand-Duché tient compte de ces dispositions, elle dispose ainsi que « Les traitements et pensions des ministres des cultes sont à charge de l’État et réglés par la loi. » (Article 106)

En revanche, les dispositions grand-ducales sur l’enseignement religieux relèvent de la législation ordinaire de l’État.

3) En 2013, les Chrétiens-sociaux (parti de Monsieur Junker) perdent pour la première fois depuis longtemps la majorité parlementaire.

Une nouvelle majorité de coalition arrive au pouvoir. Elle comprend le Parti Démocratique (libéral dirigé alors par Xavier Bettel, depuis lors chef du gouvernement), le Parti Socialiste Ouvrier Luxembourgeois (social-démocrate) et le Parti des Verts.

Cette coalition proposait un programme de gouvernement qui prévoyait notamment :

  • une politique très avancée dans le domaine sociétal
  • une réforme constitutionnelle portant notamment sur
    • le financement des ministres des cultes ;
    • les droits politiques des concitoyens non luxembourgeois ;
    • la participation des jeunes au processus politique ;
    • la limitation dans le temps des mandats ministériels.
  • une révision complète du régime des cultes :

Les réalités sociétales requièrent une remise en cause des relations Actuelles entre l’État et les cultes. Les partis de la coalition gouvernementale affirment le principe du respect de la liberté de pensée, de la neutralité de l’État à l’égard de toutes les confessions religieuses ainsi que de l’autodétermination des citoyens. 

Le Gouvernement dénoncera les conventions existantes pour entamer des négociations avec les cultes, lancer une discussion sur leur financement et redéfinir les relations entre les communes et les cultes. La législation relative aux fabriques d’église sera remplacée par une réglementation qui garantira la transparence au niveau du patrimoine et des ressources des Églises. 

Il sera introduit un cours unique neutre et harmonisé d’éducation aux valeurs pour tous les élèves de l’enseignement fondamental et secondaire, lequel remplacera les cours actuels « Formation/Éducation morale et sociale » et « Instruction religieuse et morale » dans l’enseignement fondamental et secondaire.  

Dès 2014, les célébrations officielles de l’État pour la Fête nationale connaîtront un acte central à caractère civil.

4) Les réformes sociétales sont pratiquent toutes adoptées (le Premier ministre Bettel épousera son compagnon immédiatement après la promulgation d’une loi sur le « mariage pour tous »).

5) La réforme constitutionnelle n’aboutit pas :

  • La majorité parlementaire est trop étroite
  • Pour un référendum les électeurs (comme souvent partout) votent pour ou contre celui qui pose la question, plutôt que sur la question posée. Or, en 2015, le gouvernement tente une telle consultation populaire sur trois sujets qui, pour deux d’entre eux au moins, semblaient devoir faire consensus (le droit de vote à 16 ans ; le vote de certains résidents étrangers ; la limitation à 10 ans la durée maximum, en continu, d’un mandat ministériel). Le vote Non l’emporte très largement pour les 3 questions … Le gouvernement ne tentera plus d’autre consultation directe de la population (Son mandat de plus s’achève cette année 2018).

6) Le gouvernement négocie et signe avec tous les cultes (dont l’Église catholique représentée par l’archevêque de Luxembourg – qui subira les critiques de sa base !) une Convention qui redéfinit complètement le régime de ces cultes.

7) Les dispositions de cette convention sont traduites progressivement en textes de lois adoptés par le Parlement :

  • Une loi modifie le décret de 1809 sur les fabriques paroissiales : les communes sont déchargées de tout financement des paroisses.
  • Les bâtiments cultuels catholiques et leurs annexes (presbytères etc.) sont confiés à une Fondation nationale catholique qui doit prendre en charge la totalité des frais d’entretien de ceux-ci.
  • 6 autres lois définissent les relations avec tous les cultes « reconnus » :
    • il s’agit des cultes catholique, protestant, orthodoxe, anglican, israélite et musulman
    • pour le culte catholique, les ministres en fonction continuent à percevoir un traitement jusqu’à 65 ans, puis une pension. Les nouveaux « embauchés » seront à la charge directe de l’Église. Celle-ci perçoit une subvention globale qui diminue progressivement (elle passera immédiatement de 24,6 à 8,3 millions d’euros)
    • pour les autres cultes, une subvention globale est aussi allouée (suivant l’importance des communautés, elle varie de 125 000 à 450 000 euros annuels).

8) Un cours « Vie et société » remplace le cours d’instruction religieuse et morale et le cours d’éducation morale et sociale, d’abord dans l’enseignement secondaire, puis dans le primaire. Les enseignants actuels de religion sont « recyclés ».

9) Selon les sondages, il n’est pas certain que la coalition actuelle soit reconduite aux prochaines élections… normalement en octobre 2018.

L’opposition chrétienne-sociale, qui pourrait revenir au pouvoir, n’a pas toujours accepté les réformes présentées ci-dessus. Or, celles-ci sont parfois contestées juridiquement : elles ont été adoptées sans que préalablement la Constitution soit modifiée…

Un nouveau gouvernement fin 2018 reviendrait-il sur certaines des réformes ? Difficile de répondre aujourd’hui à cette question…

Michel Seelig