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Accusé de racisme et d’antiféminisme dans « Le Monde » et « Libération », le philosophe défend sa vision universaliste du droit des femmes comme de l’antiracisme.

 Propos recueillis par Thomas Mahler, publié le 04/09/2018 à 18:59 | Le Point.fr

Raphaël Enthoven serait-il à la fois raciste et misogyne ? C’est l’impression qui, ces jours-ci, ressort de la lecture de deux quotidiens de référence. Sur Le Monde.fr, une chronique d’Hamidou Anne est devenue l’article le plus lu du site en expliquant que le philosophe, mais aussi Laurent Bouvet ou Gilles Clavreul (du Printemps républicain) contribuent à un acharnement raciste contre Rokhaya Diallo. «  De manière quasi quotidienne, avec une obsession qui frise la pathologie, ces hommes blancs, intellectuels médiatiques, la livrent en pâture à leurs followers. Ils savent qu’ils peuvent agir de la sorte sans devoir se justifier, surtout dans une période de libération de la parole raciste et d’excitation du phénomène identitaire  », écrit Hamidou Anne, qui se présente comme «  consultant en communication institutionnelle sénégalaise  ». Dans Libération, c’est Léa Domenach qui publie une lettre ouverte à Marlène Schiappa pour déplorer la présence de Raphaël Enthoven parmi les «  intervenant.e.s  » aux universités d’été du féminisme, organisées les 13 et 14 septembre. «  Ses prises de position à l’antenne sont autant de claques dans la figure du féminisme  », assure cette réalisatrice. Frappés par ces deux attaques véhémentes, nous avons donné la parole au présentateur de Philosophie sur Arte.

Le Point : Hamidou Anne, communicant et chroniqueur du Monde Afrique, vous range parmi « ces hommes blancs, intellectuels médiatiques » qui livrent en pâture Rokhaya Diallo à vos followers et la « lynchent médiatiquement »…

Raphaël Enthoven : Le lexique n’est pas innocent. Mais raciste et outrancier. Déduire mes opinions de la couleur de ma peau, c’est du racisme. Parler de « pâture » ou de « lynchage », voire de « harcèlement » (pour désigner, en ce qui me concerne, de courtoises invitations à discuter), c’est outrancier. On sent, dans cette tribune, le dépit d’une censure qui n’a pas les moyens de sa haine. L’auteur déclare, en préambule, que Mme Diallo « dérange ». Or, Rokhaya Diallo ne dérange rien du tout ! Ses prises de position (toutes prévisibles) sur des sujets comme la couleur des pansements, l’accusation systématique d’être un « nègre de salon » faite à tout interlocuteur noir en désaccord, et l’obstination à se présenter comme la victime d’une sainte alliance « république-pouvoir blanc » font d’elle un poids mort dans la lutte pour l’égalité et contre le racisme. Pire (et sans vouloir retourner l’accusation) : les seuls à déclarer, après la victoire de la France, que la Coupe du monde avait en fait été gagnée par l’Afrique, étaient les identitaires blancs (pour s’en désoler) et les identitaires « racisés » (comme ils se désignent) pour s’en réjouir…