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La République et son École sont attaqués au cœur et à l’âme.

La décapitation à Conflans-Sainte-Honorine  d’un professeur d’histoire-géographie, qui avait montré à ses élèves des caricatures de Mahomet, a frappé d’effroi la France, de nouveau touchée par un « attentat terroriste islamiste caractérisé », selon les mots d’Emmanuel Macron, trois semaines après l’attaque devant les anciens locaux de Charlie Hebdo

Quelques heures après l’assassinat de l’enseignant, le chef de l’État entouré du ministre de l’Intérieur et du ministère de l’Éducation a appelé la nation à « faire bloc »,  à la sortie du collège du Bois d’Aulne où travaillait la victime. « Ils ne passeront pas. L’obscurantisme ne gagnera pas ». A cet égard les très nombreux rassemblements quasi spontanés  de ce dimanche laissent à penser que les citoyens sont déterminés à faire réagir l’Etat au plus vite. Cette décapitation est en effet, selon Manuel Valls « effrayante et symbolique » et l’action gouvernementale urge.

Toutes ces déclarations sont nécessaires mais que convient-il de faire après avoir contribué collectivement au deuil de la famille, des proches et du corps enseignant ?

Observer d’abord que les clignotants sociétaux n’ont pas manqué depuis des années. Cette barbarie, dans le droit fil des attentats sanglants djihadistes amorcée en 2015 en France a fait au total plusieurs centaines de victimes. Ces attaques, pour beaucoup d’entre elles, ont été perpétrées à l’arme blanche entre autres à la préfecture de police de Paris en octobre 2019, ou à Romans-sur-Isère en avril dernier.

Quel que soit le criminel qui perpétue ce type d’acte, le but est d’ébranler l’édifice républicain et  les principaux piliers de notre devise nationale.

La République est en danger notamment du fait de l’islamisme. Mais, au-delà, la société française l’est aussi  pour trois causes qui  caractérisent notre espace national :

La mémoire historique a  été mal entretenue.

Les valeurs héritées du siècle des Lumières, liberté, égalité fraternité puis laïcité n’ont pas été entretenues au niveau de l’espérance universelle qu’elles ont fait naitre. Et cette négligence s’est accélérée ces dix dernières années.

L’indulgence manifestée par des intellectuels, des responsables politiques, syndicaux et associatifs à l’égard de ceux qui perturbent l’ordre républicain, l’hédonisme généralisé d’une société qui n’a d’intérêt que pour le moment qui passe, la méconnaissance historique  du principe de liberté comme des droits et devoirs du citoyen et la permissivité par rapport aux lois sur le racisme, l’antisémitisme ou l’égalité homme/femme ont contribué largement au fait de ne plus faire Nation.

   – le vivre ensemble républicain a été encouragé à contre sens

notamment sur le contenu à donner au terme fraternité. Les petits arrangements  et les accommodements irraisonnables se sont multipliés à tous les niveaux de notre société

Au niveau local, le dispositif républicain  dans les Écoles s’est  fracturé le jour où dans les écoles publiques et privées nous avons accepté les menus sans porc, finassé avec le voile pour les sorties scolaires, autorisé des horaires différenciés pour les piscines publiques. Mais précédant ces attitudes au plan national le terrain avait été préparé par une politique d’accueil des migrants entassés dans des quartiers quasi dédiés, ou encore le jour où des fonctionnaires  ont été autorisés à faire leur prière sur leur lieu de travail ou encore le jour où, faute de fonctionnaires de police ou d’enseignants, on a négligé les fonctions essentielles de ces professions.

Pire encore, dans le Livret laïcité de l’éducation nationale en 2015 un texte signé de la ministre de l’Éducation, Najat Vallaud-Belkacem, rappelle le principe consistant à « distinguer le savoir du croire ». « Il faut pouvoir [pour les enseignants] éviter la confrontation ou la comparaison du discours religieux et du savoir scientifique. Dans les disciplines scientifiques (SVT, physique-chimie, etc.), il est essentiel de refuser d’établir une supériorité de l’un sur l’autre comme de les mettre à égalité.» Cette « injonction au silence »  a contribué à faire courber l’échine d’une institution, l’École, qui par sa nature  détentrice des connaissances et de l’apprentissage de l’esprit critique doit toujours rester à l’abri des polémiques. L’École est l’un des piliers majeurs de la République

l’ordre républicain est sapé

depuis plusieurs décennies. Il n’y a plus de réponse ferme et lisible pour ceux qui viennent sur notre territoire. Rappelons pour fixer un cap clair l’affirmation de Saint Just « il n’y a pas de libertés pour les ennemis de la Liberté ». Cette orientation donne le chemin à parcourir dans un contexte d’augmentation progressive des violences qui a atteint un niveau inacceptable, insupportable.

Que faire ?

Sur sa page Facebook  Céline Pina révoltée par l’assassinat de Samuel Paty propose :

« Pour ce qui vient de se passer je ne connais qu’une seule réponse si j’étais au gouvernement: j’afficherai dans tous les établissements scolaires, toutes les institutions, je prendrai des publicités dans les journaux, dans le métro, sur les bus. Je paierai des 4×3 et je créerai une affiche reprenant les caricatures de Charlie et revendiquant cet affichage au nom de la liberté d’expression et pour rendre hommage à ce professeur martyr. » Je ne suis pas loin de penser comme elle afin qu’il y ait dans la société un vrai choc salutaire.

Mais il faut ajouter de donner très vite un contenu législatif ou réglementaire à l’interdiction de mosquées  liées au salafisme et aux frères musulmans.

Enfin il faut rediffuser largement ce qui est entré dans notre droit positif français depuis plus d’un demi-siècle : l’article 18 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme (10 décembre 1948) stipule « toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion.»…Et le commenter sans cesse en mémoire de Samuel.

Bernard FERRAND, VP EGALE