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Dix-sept Décisions ont été publiées à la suite de la première réunion du Comité interministériel de la laïcité (CIL), le 15 juillet 2021. Ces décisions sont axées principalement sur le respect de la laïcité par les services publics, en insistant sur la mise en œuvre de la formation nécessaire des différents acteurs, comme du suivi des actions menées. Si ces actions recoupent des recommandations que nous avons souvent faites en matière de respect des textes juridiques et réglementaires et de formation, le document lui-même appelle quelques observations préalables.

Il s’agit d’un texte de nature gouvernementale, sans référence directe ou implicite aux propositions assurées par ceux qui ont accepté de dialoguer dans le cadre de des États généraux de la laïcité. On ignore combien de ces recommandations ont été prises en compte et lesquelles. Ces décisions en second lieu n’engagent que le gouvernement tel qu’il fonctionne en juillet 2021. Qu’en restera-t-il dans moins d’un an, avec les échéances électorales que nous connaissons ?

D’autre part quels seront réellement les moyens déployés pour la mise en œuvre des décisions annoncées ? Tant sur le plan des engagements humains (les futurs acteurs), qu’en termes d’engagements financiers ? S’ils ne sont pas clairement inscrits dans la prochaine loi de finances, budget ministériel par budget ministériel, le risque est grand de voir les meilleures intentions tourner en usines à gaz ou rester lettre morte. Ne perdons pas en mémoire que parmi les membres du gouvernement, et non les moindres, certains ne s’intéressent à la laïcité que dans la mesure où ils l’entendent comme un moyen de contenir l’islam. S’il s’agissait de résorber les privilèges des représentants de leurs propres convictions, on sait bien qu’ils détourneraient pudiquement les yeux.

Autre question, et ce n’est pas la moindre, car nous en avons déjà eu l’expérience dans la lutte contre les extrémismes : les personnels chargés dans les différents départements, sous l’autorité des préfets, ont souvent déjà lâché prise en matière de laïcité. Comment peut-on être certain aujourd’hui de disposer d’assez de personnel qualifié et assez volontariste pour promouvoir la laïcité au-delà de leurs convictions personnelles ? Nous ne sommes plus au début de la IIIe République, quand les gouvernements radicaux et socialistes pouvaient compter sur des hussards noirs aguerris dans la lutte contre les extrémismes convictionnels. Au plan des collectivités locales, la question se pose avec plus encore d’acuité. Le gouvernement dispose-t-il d’assez de préfets sérieusement motivés pour faire appliquer partout ces 17 décisions, quand on connait la volonté souvent peu dissimulée de certaines municipalités de subventionner l’enseignement privé commercial ou religieux au détriment de l’école publique ?

On peut conclure à ce stade que si les intentions paraissent intéressantes à la lecture du document, il faudra attendre quelques années avant de savoir si elles arrivent à passer dans les faits.

Alain Vivien