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On le savait, le ministre de l’Éducation nationale, Pap Ndiaye, n’est pas un fervent défenseur de la laïcité. Il dispose au ministère d’un Conseil des Sages qui avait largement démontré sa capacité à expliquer et enseigner ce principe de laïcité. Depuis sa création en 2018, il avait fourni aux enseignants des outils pour assumer leur pédagogie sur un sujet qui rencontre des oppositions fortes dans certaines classes. Le Conseil s’est attaché à montrer que ce principe républicain vise à la liberté de chacun par l’émancipation de tous. De nombreuses publications en attestent : La laïcité à l’école, Agir contre le racisme et l’antisémitisme, Coffret du Guide républicain, Liberté d’expression neutralité et laïcité dans le champ des activités physiques et sportives…Il avait largement participé à la formation des enseignants sur le sujet.

Manifestement ce n’est pas cela que le ministre attend du Conseil des sages. Il a raccourci d’un an la durée du mandat des membres actuels, une façon sans doute de les faire partir plus vite et a fait entrer d’autres personnalités : Gwenaële Calvès et Thomas Hochmann, deux professeurs de droit public, Christine Darnault, professeure agrégée de lettres et inspectrice d’académie, de Jacques Fredj, directeur du Mémorial de la Shoah, et enfin du sociologue et politiste Alain Policar, très controversé car dénonçant à la fois une « laïcité de combat » qui serait selon lui, en guerre contre les religions, et les revendications identitaires auxquelles il ne souscrit pas. Christophe Capuano, historien remplace Jean-Eric Shoettl, démissionnaire.

Le ministre a également alourdi sa tutelle sur cette instance qui ne doit plus prendre d’initiatives, mais attendre d’être sollicitée par lui-même ou par les recteurs d’académies. Ses productions seront destinées au seul ministre qui en acceptera ou non la publication. Cette reprise en main qui illustre la « voie moyenne » recherchée par le ministre, faite à la fois de volonté d’inclusion de tous et de profil bas sera-t-elle plus efficace pour restaurer parmi les élèves et les enseignants cette appropriation des valeurs républicaines, ce sentiment d’appartenance à une société commune dont nous avons cruellement besoin ou sera-t-elle balayée par la violence des identitarismes à l’œuvre ? Pour l’instant, aucune méthode n’a été appliquée clairement par des politiques sans ambiguités et c’est bien de ces indécisions constantes accompagnées du renoncement à enseigner les savoirs que l’école souffre aujourd’hui.

Martine Cerf