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Les magistrats se demandent si une congrégation est fondée à demander le remboursement d’un impôt sur la construction.

Sandrine Morel (Madrid, correspondance le Monde.fr)

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) entre dans le débat sur les privilèges de l’Église espagnole. « Les exonérations fiscales dont jouit l’Église catholique en Espagne peuvent constituer des aides d’État prohibées si et dans la mesure où elles sont octroyées pour des activités économiques », estime la CJUE dans un arrêt rendu mardi 27 juin.

L’affaire concerne une congrégation religieuse responsable d’une école ecclésiastique de Getafe, dans la banlieue de Madrid, qui a demandé le remboursement des 24 000 euros payés au titre d’un impôt municipal sur les constructions. La Cour de justice européenne, saisie par un tribunal espagnol, s’interroge sur l’activité de l’école en question, qui dispense notamment un enseignement préscolaire et extrascolaire payant, qui ne serait donc pas strictement religieux, mais s’apparente aussi à une activité marchande. Les aides pourraient non seulement « représenter un avantage économique sélectif » mais impliquer une « diminution des recettes de la municipalité ». Prudente, la conférence épiscopale a réagi par un bref communiqué, affirmant que ses services juridiques se penchent sur cette question « complexe ».

Collimateur

Cela fait longtemps que les avantages de L’Église espagnole, riche et influente, sont dans le collimateur des associations laïques et de la gauche radicale. Même le Parti socialiste, conscient du rejet provoqué par ses exemptions d’impôts lorsque la crise sévissait, s’est prononcé à plusieurs reprises en faveur d’une remise à plat du concordat de 1979 qui les entérine.

Pour l’association Europa Laïca, l’arrêt est déjà une victoire. « Il faut attendre de voir comment les conclusions seront interprétées par les juges d’Espagne, mais elles ont le mérite d’ouvrir un débat sérieux sur les avantages de L’Église, se félicite le président de l’association, Francisco Delgado. Nous allons maintenant essayer de convaincre les

administrations publiques de porter plainte dans les cas flagrants où l’Église est exonérée d’impôts alors qu’elle réalise une activité économique. »

Et de citer le cas de la mosquée-cathédrale de Cordoue, propriété de l’archevêché depuis qu’il l’a inscrite discrètement à son nom en 2006.

L’entrée coûte 10 euros et l’Église en tirerait 13 millions d’euros par an, selon les estimations de la presse, sans payer le moindre impôt sur ces recettes.