-

Parce que de plus en plus de familles souhaitent lui confier leurs enfants, il milite contre un tabou politique et réclame plus de professeurs. La règle de répartition des enseignants entre public et privé sous contrat tient en deux chiffres : 80-20. Apel, association de parents de l’enseignement catholique sous contrat réclame pour la première fois sa modification et ce, de façon officielle. L’élection présidentielle peut apparaître comme le moment adéquat. Sauf que le sujet est politiquement sensible car personne ne souhaite un réveil de la guerre scolaire dont le dernier épisode remonte à la grande manifestation de 1984 en faveur de l’enseignement libre. Les laïques, comme les partisans de l’école catholique préférant éviter l’affrontement, tous restent attachés aux équilibres construits au fil des années depuis la loi Debré en 1959. En 1993, un accord de compromis avait entériné la règle de proportionnalité de « 80-20 » mise en place en 1985, avec la notion de crédits limitatifs. Cet accord « gagnant-gagnant » se basait sur la répartition réelle des élèves entre les deux systèmes. Mais près d’un quart de siècle plus tard, l’enseignement catholique se sent à l’étroit. « Cette règle permet aujourd’hui de bloquer l’expansion de l’enseignement catholique privé, résume Bernard Toulemonde, inspecteur général à la retraite. Je ne connais pas d’hommes politiques qui souhaitent une évolution, sauf ceux qui veulent des ennuis… » Pour l’association de parents Apel, cette proportion qui ne correspond plus aux parts de marché des deux parties ne permet pas de répondre aux attentes des familles de plus en plus nombreuses sur les listes d’attente des établissements catholiques. Entre 30 000 et 40 000 élèves, selon des estimations non exhaustives. À ce jour, les élèves du privé sous contrat pèsent à hauteur de 17 % dans les effectifs globaux, avec une proportion plus élevée au collège (21,5 %) qu’à l’école primaire (13,7 %). Les raisons de ce succès : un encadrement des élèves plus structuré, un absentéisme des enseignants moins élevé que dans le public et une liberté plus grande dans le recrutement des enseignants. L’Apel (Association des parents de l’enseignement libre) – qui rassemble plus de 900 000 familles – a donc choisi d’interpeller les candidats à la présidentielle sur ce sujet. Le Secrétariat général de l’enseignement catholique (SGEC) et ses 7 560 établissements, prépare, pour fin février, une liste de propositions à l’adresse de ces mêmes candidats. Et s’agace déjà de l’attentisme de ces derniers sur le sujet. Pourquoi ne pas aligner les moyens sur la « reconnaissance du besoin scolaire », comme le formule la loi Debré ?

Dans le camp les Républicains, on regrette l’absence de cette prise en compte de « l’exode » des effectifs vers le privé, selon les mots du député (LR) Patrick Hetzel, dans une question au gouvernement le 11 janvier. Faire sauter le verrou du 80-20François Fillon avait évoqué la remise en question de cette proportion dans son livre paru en 2015 puis au cours de la primaire. La droite « veut faire sauter le verrou des 20 % d’enseignement privé (…), instaurer un grand marché concurrentiel de l’éducation dans lequel ce seront toujours les familles qui ont les moyens de payer qui s’en sortiront le mieux », a contre-attaqué du tac au tac la ministre de l’Éducation Najat Vallaud-Belkacem. Preuve que les postures empêchent pour l’heure tout débat sur le sujet. « Il ne s’agit pas d’agiter des chiffons rouges. Nous ne cherchons pas la provocation », martèle Annie Genevard, secrétaire générale adjointe des Républicains. « Mais nous sommes prêts à soutenir toutes les bonnes initiatives évaluées, là où les besoins éducatifs sont avérés », ajoute-t-elle, évoquant le « hors contrat » qui, avec des effectifs peu élevés, concurrence lui-même le « sous contrat ». Faire sauter le verrou du 80-20 permettrait, entre autres, d’alléger les effectifs par classe, plaide-t-on, dans le « sous contrat ». Mais pour les syndicats d’enseignants du public dans leur ensemble, de droite à gauche, pas question d’accentuer une concurrence qu’ils qualifient de « déloyale ». Ils demandent, au contraire, que l’enseignement catholique soit soumis, comme le public, aux règles de la carte scolaire.