Le New York Times du 8 janvier 2023 se fait l’écho d’un incident qui n’est pas sans rappeler le souvenir de Samuel Paty, la violence en moins.
Erika López Prater, professeur vacataire de la Hamline University à Saint-Paul dans le Minnesota, s’est retrouvée bien involontairement au centre d’une controverse qu’elle avait pourtant cherché à éviter et avec elle, les responsables de l’université qui l’employaient.
Elle avait été embauchée dans cet établissement relativement modeste pour enseigner un « cours d’histoire mondiale de l’art » et à ce titre, elle avait choisi de montrer des représentations du Bouddha et du prophète Mahomet à ses étudiants, parmi lesquels figuraient un certain nombre de musulmans pratiquants.
Elle avait pris soin de les prévenir au préalable et leur avait demandé de lui faire part d’éventuelles remarques. Aucune ne lui parvint. Elle réitéra sa mise en garde au début du cours, proposant à ceux qui pourraient en être choqués de quitter la salle, puis, elle leur présenta une miniature persane du XIVe siècle, représentant l’archange Gabriel révélant la parole de Dieu à Mahomet.
Malheureusement, en dépit de ses précautions, une étudiante partit immédiatement se plaindre à la direction, expliquant qu’elle s’était sentie agressée dans sa foi par l’image en question et exigeant que des mesures soient prises contre l’enseignante.
C’est ce qui se produisit puisque le contrat de celle-ci ne fut pas renouvelé au motif que l’incident était clairement un cas d’islamophobie. Dans un message adressé à tout le campus, la Rectrice de l’université, Fayneese S. Miller, expliqua que le respect dû aux étudiants musulmans devrait nécessairement prendre le pas sur la liberté pédagogique.
Un intervenant musulman expliqua que ce qui s’était passé équivalait à expliquer « qu’Hitler était quelqu’un de bien. »
Les associations de défense de la liberté d’expression, comme PEN America, montèrent aussitôt au créneau, soutenues par de nombreux universitaires, elles firent circuler une pétition pour défendre l’enseignante limogée. La communauté musulmane connut elle-même de vifs débats en son sein.
Le New York Times souligne le fait que les débats sur la liberté d’enseigner sont fréquents sur les campus américains, mais qu’ils sont amplifiés dans des établissements modestes qui peinent à recruter et qui s’efforcent d’attirer des candidats issus de milieux peu habitués à fréquenter l’enseignement supérieur.
Le journal constate néanmoins une contestation grandissante des étudiants les plus militants comme des législateurs conservateurs vis-à-vis des enseignants.
Il est intéressant de constater que le grand quotidien américain, qui critique régulièrement la laïcité à la française, semble prendre progressivement conscience des problmes soulevés par ce genre d’incident.
JP Gross