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Un joli fœtus bien rose qui explique qu’il entend tout et qu’il est bien vivant. Voici la couverture du « manuel de bioéthique » édité par la fondation Lejeune, une association anti-avortement et anti-euthanasie. À l’intérieur de cette brochure, il est écrit qu’en France « près de 9 millions d’avortements ont été pratiqués depuis 1975 » ce qui représente « 9 millions d’enfants uniques, irremplaçables ». Un peu plus loin, on explique encore qu’un enfant né d’un viol est « innocent » et qu’il ne mérite pas « la peine de mort ». Cette publication, dont la première édition a été sortie en 2006, aurait pu rester confidentielle si deux lycéennes de l’Académie de Montpellier n’avaient pas envoyé au dessinateur Nawak des photos de la brochure. La publication sur Facebook de ces photos a été largement partagée et commentée depuis sa mise en ligne.

« On a trouvé ce manuel mardi 27 septembre sur un présentoir à la vie scolaire de notre lycée », raconte l’une d’elle contactée par Le HuffPost, outrée par ce qu’elle a pu y lire. « Je voulais envoyer un mail à la direction de mon lycée mais quand j’ai vu l’ampleur que ça prenait sur Internet, j’ai préféré attendre », nous assure la jeune femme alors que la journée mondiale du droit à l’avortement tombe justement ce mercredi.À Paris aussi. Le lycée en question, privé sous contrat avec l’État, n’est pas le seul dans ce cas. Après la publication de Nawak, une parent d’élèves d’un grand lycée privé parisien nous a aussi contactés pour témoigner. « Mes deux filles aînées ont eu entre les mains ce manuel de bioéthique », raconte-t-elle interrogée par Le HuffPost. « C’était en classe de première pendant leur « formation humaine et religieuse » donc hors des cours. C’est surtout ma deuxième fille qui m’a alertée en 2013. Pendant la lecture du manuel et de témoignages terribles sur l’avortement, une de ses camarades s’est même évanouie. »Dans le lycée en question, le catéchisme et ce qu’on appelle les « parcours » religieux sont assurés par des parents d’élèves. Ce sont eux qui ont donné aux élèves ce « manuel » et ils sont allés plus loin. « On leur a expliqué que le stérilet était une méthode d’avortement, un témoignage expliquait qu’une femme qui avortait pouvait sentir son bébé souffrir, ses yeux brûler ou encore que certains avortements démembraient les bébés. » Cette mère d’élève a bien essayé de s’insurger contre ce genre de discours, sa colère n’a fait réagir personne. »J’ai appelé l’aumônerie en hurlant, ils se sont justifiés en disant qu’ils donnaient aussi une photocopie de la loi Veil. J’ai alerté la direction de l’enseignement catholique de Paris, ils m’ont répondu qu’ils ne s’occupaient que de la partie pédagogique obligatoire », déplore-t-elle en espérant maintenant que les choses vont pouvoir bouger grâce à Internet. Sa troisième fille vient de faire sa rentrée en première, « j’attends de voir si elle va aussi avoir droit à son manuel ». »On y expose de manière objective la question de l’avortement »

Contactée par Le HuffPost, la Fondation Lejeune ne s’est pas étonnée de voir que son manuel « à destination des jeunes » était diffusé dans les établissements scolaires. Impossible d’avoir un chiffre précis du nombre d’établissements concernés, ce manuel est disponible et édité sur demande auprès de la fondation. Il serait diffusé « à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires » selon une estimation de la fondation, impossible à vérifier. « On l’édite beaucoup pour les JMJ et ce genre d’événements ». Pour ce qui est du contenu, le service de presse de la fondation ne comprend pas la polémique. « Ce manuel a été écrit par des médecins, des juristes, des philosophes. On y expose de manière objective la question de l’avortement », expliquent-ils au HuffPost. « Nous n’avons jamais eu de souci, assurent-ils aussi. Ce n’est pas comme si c’était diffusé dans un centre de planning familial. Lorsque l’on met ses enfants dans un établissement catholique, pourquoi s’en étonner? C’est la position de l’église sur l’avortement. »Les deux personnes qui ont témoigné ont demandé à rester anonymes et à ce que le nom des établissements ne soit pas dévoilé.

Sandra Lorenzo Huffpost